Des économies de fourrages grâce au pâturage des couverts

Le couvert améliore la portance des sols. ©DR
À l’occasion  d’un webinaire sur les couverts en action organisé par le GIEE Magellan, l’association Agroforesterie et Agr’eau, deux polyculteurs-éleveurs, Guillaume Larue et Romain Maillault, ont témoigné de leurs expériences. En misant sur l’agronomie, ils obtiennent un meilleur bilan économique.

Impasse technique en désherbage, problème de fertilité des sols, de qualité de l’eau, recherche d’autonomie protéique et diminution des intrants, tous ces thèmes ont incité six agriculteurs de la Nièvre à créer l’association Magellan qui a été labellisée GIEE en 2015. Aujourd’hui, ils sont 38 producteurs à avoir rejoint la structure avec pour objectif de retrouver de la rentabilité par l’agronomie. Si l’agriculteur a peu de prise sur le prix des cultures, il peut jouer sur le rendement,  les charges opérationnelles, les charges de mécanisation (semis direct de couvert, organisation des chantiers) et de main-d’œuvre en privilégiant des associations de cultures, en agissant sur le choix des cultures, les conditions de milieu, la fertilité des sols voire la lutte agronomique. Deux adhérents du GIEE Magellan témoignent de leur expérience.
 

Nous n’avons plus de rotation
 

Après avoir augmenté le nombre de leurs cultures, les deux agriculteurs affirment ne plus avoir de rotation prédéfinie.

Nous nous adaptons aux conditions climatiques, affirment-ils, mais aussi au marché.  Par exemple, nous avons augmenté les surfaces en méteils pour faire face aux conditions difficiles de stockage de fourrage cette année.

Romain table ainsi sur douze cultures différentes (colza, blé, seigle, épeautre, maïs grain et ensilage, tournesol, vesce, pois potager, avoine de printemps et d’hiver, lin de printemps ainsi que sorgho). Certaines années, des cultures vont disparaître au profit d’autres afin de mieux s’adapter.
 

La mise en place du semis direct
 

Romain explique qu’en 2015, il a fait le choix de passer au semis direct (semoir Tempo) sur 5 ha dans sa parcelle la plus sale de l’exploitation où du blé a été semé après colza. 

Il est nécessaire de choisir une parcelle dont le suivi est facile, pour laquelle on adapte ses dates de semis, les cultures que l’on met en place. Mais une chose est sûre, le sol doit être en bonne santé avec une fertilité chimique, mais aussi biologique et physique efficiente. 

Et Romain d’ajouter  :

Ce n’est pas le couvert qui restructure le sol. Les racines par exemple vont avoir du mal à pénétrer une semelle de labour à 20 cm. Nous n’hésitons donc pas à utiliser le décompteur si nécessaire. 


Pour vérifier l’état du sol, les membres du GIEE pratiquent le test bêche. À l’aide des fourches d’un télescopique, ils prélèvent la terre qu’ils déposent sur des palettes rapprochées au bout du télescopique.
 

Le couvert Magellan et CO+

 
Au départ, les membres du GIEE voulaient produire chacun une espèce pour créer le mélange. Mais très vite, cette solution a trouvé ses limites (risque d’aléas climatiques, de propagation des adventices et bioagresseurs entre les exploitations, difficulté de logistique). Ils ont fait appel à un semencier qui a créé le mélange Magellan opti selon les demandes des producteurs : Niger (2 kg/ha), radis chinois (0,75 kg/ha), moutarde d’Abyssinie (0,75 kg/ha), trèfle d’Alexandrie (2 kg/ha) et phacélie (1,5 kg/ha). Ce mélange est devenu disponible dans toute la France. Souvent, à ce mélange, les producteurs rajoutent d’autres espèces produites sur la ferme (seigle, féverole, avoine…).

L’autre mélange a été conçu pour des plantes compagnes de colza dont chaque espèce remplie un rôle : lentille (5 kg/ha) pour son effet couverture, le fenugrec (4,5 kg/ha) pour sa production de biomasse et port dressé, le trèfle d’Alexandrie (2 kg/ha) pour sa vitesse de croissance, sensibilité au gel et le lin de printemps (1 kg/ha) pour son effet bouche-trou et sensibilité au gel.
 
 La présence de légumineuses dans les mélanges pose la question de la disponibilité de l’azote pour la culture.  

C’est difficile de quantifier la quantité d’azote issu du mélange disponible pour la culture en place ou future. Nous envisageons de tester des outils comme le N-tester pour mieux ajuster la fumure en cours de végétation, note Romain. Mais aujourd’hui, nous n’en tenons pas compte car l’azote produit par les légumineuses alimente aussi les micro-organismes du sol. 

Les deux éleveurs rappellent que l’implantation des couverts nécessite un roulage lent pour limiter les adventices.  
 

Des économies grâce aux couverts

 
Les deux éleveurs ont décrit plusieurs scénarios qui permettent de réduire les intrants. Le principe est d’utiliser tous les atouts du couvert sur le plan agronomique mais aussi pour l’élevage (pâturage), ce qui, au final, permet des économies.  
Le premier est adapté à l’optimisation fourragère en faible potentiel dans la région du Morvan.
Après une prairie de deux ans, un semis d’orge d’hiver est pratiqué à l’automne. Dès la moisson de la céréale, un semis de couvert (sorgho, trèfle d’Alexandrie, radis chinois, féverole et tournesol) est effectué (mi-juillet) qui à partir de septembre est pâturé par des bovins.

Cela nettoie la parcelle, explique Romain, nourrit le cheptel et fertilise le sol grâce aux déjections. Les animaux font notre travail. Ainsi, on économise des charges comme le gasoil. 


Le semis du méteil est prévu le 10 octobre. Ce dernier est ensilé aux environs du 20 mai (6 t matière sèche/ha). Et dans la foulée, un mélange de colza, sorgho et lotier est semé vers le 1er juin. À l’automne suivant, cette parcelle va être de nouveau pâturée par 23 génisses en reproduction durant 15 jours sur septembre avec les mêmes attentes bénéfiques que la saison précédente. Après un passage de glyphosate (1,5 l/ha), un semis direct de blé est effectué dans le couvert.
Résultat, l’éleveur aura économisé quatorze bottes de foin et six bottes de paille soit 938 euros pour 7,7 ha (121 euros/ha).
 

 Le second exemple concerne les implantations de couverts permanents pour faire face aux étés secs.
 
Avec l’implantation d’un couvert permanent (50/60 euros/ha), les agriculteurs ne s’écartent pas de trois objectifs :
- la diversité dans l’assolement ;
- couvrir le sol pour lutter contre les adventices et bioagresseurs, limiter l’érosion,  la battance, et l’évapotranspiration, stocker de l’azote avec les légumineuses ;
- éviter le travail du sol pour respecter la vie du sol et maintenir la matière organique dans les premiers horizons. Les doses de glyphosate utilisées sont faibles (entre 1 et 1,5 l/ha).
 
Les agriculteurs ont observé que le couvert permanent apporte de l’humidité au sol et une meilleure portance après des périodes pluvieuses. Le couvert joue aussi sur la température du sol (différence jusqu’à 5/6°C).

Le colza est donc semé début août avec un mélange de cinq ou six plantes gélives (couvert CO+) pour lutter contre les altises auquel est ajouté de la luzerne (10 kg) ou du lotier (10 kg) ou du trèfle blanc (3 kg) ou du trèfle violet (6 kg). Les plantes compagnes sont détruites par le gel ou un herbicide (Lontrel) ou un antidicotylédones du colza en hiver. Lorsque le colza est en fleur, il ne reste plus que la légumineuse. Après moisson de la crucifère, cette dernière pousse très vite en présence de lumière.

Cet été 2020, nous avons eu la chance de faire pâturer 45 vaches et 45 génisses dans le lotier durant 15 jours en juillet, relève Romain. Un second pâturage a pu aussi être effectué. Le lotier a l’avantage de ne pas craindre le surpâturage. Lorsque les conditions poussantes le permettent et les stockages de fourrages suffisants, le pâturage du lotier peut être repoussé en septembre à la suite d'un broyage après la récolte du colza. 

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