« La production laitière française a progressé entre la fin des années 2000 jusque 2014-2015, elle a baissé et aujourd’hui nous sommes dans une phase de stabilisation », analyse Gérard You, responsable du département économie des filières à l’Institut de l’élevage.
Gérard You explique la trajectoire française par le fait que « la production soit encadrée par les contrats commerciaux et coopératifs. Est-ce que ce n'est pas synonyme d'un faible appétit du lait des transformateurs français depuis la fin des quotas laitiers ? »
Un excédent commercial qui s'érode
Le débouché intérieur est robuste et plutôt captif : les ménages consomment 41,8 % de la collecte nationale (débouché conforté en 2020), 40 % de la collecte part à l'export, 11,9 % vers les industries agroalimentaires et 6,3 % vers la restauration hors domicile."La consommation de 22 Md de litres est couverte pour les deux tiers en produits français. La consommation nationale est déséquilibrée, on consomme plus de matières grasses que de protéines laitières en France", observe l'économiste.
"L'excédent commercial est important mais évolue peu depuis quelque temps", poursuit Gérard You. Les exportations sont contenues faute de disponibilités. Elles ont moins augmenté vers l'UE 27 que vers les pays tiers.
L'excédent tend à s’éroder notamment vers l'Espagne et l'Italie. Le solde commercial avec l'UE 27 s’est fortement dégradé en dix ans. Le Royaume-Uni est le pays avec lequel l'exédent commercial est le plus élevé.
Résultats mitigés pour la loi Egalim
En France, les relations éleveurs-collecteurs sont déséquilibrées. Si la loi Egalim a permis des avancées réglementaires, les résultats restent mitigés."Malgré Egalim, la mise en œuvre de la logique de marche avant dans la formation des prix est laborieuse, observe Gérard You. Malgré tout il y a des petits effets sur l'évolution du prix du lait à la production. Depuis 2017, le prix du lait s’est détaché du prix allemand et est moins sensible aux évolutions des marchés des commodités laitières."
"Est-ce que la ressource continuera à être abondante à l’avenir ?", interroge Gérard You.
"La pyramide des âges est très déséquilibrée, les nombreux départs ne sont que partiellement remplacés. Nous sommes sur un rythme inédit de réduction du nombre de chefs d'exploitation et d'unités de travail dans les exploitations laitières", observe Christophe Perrot, chef de projet à l'Institut de l'élevage.
"Les trajectoires individuelles se détournent de la croissance. On note une chute du nombre total de vaches laitières. On pressent un très léger plafonnement du nombre moyen de vaches par exploitation, peut-être en raison pénurie de main-d'œuvre, salariée et non salariée.
" On enregistre tout de même 2000 nouveaux producteurs laitiers par an avec une forte diversité de projets et de systèmes. Il semble toutefois que le déclin du cheptel soit amorcé et persiste au vu de la force de travail, salariée et non salariée, actuelle", conclut le chef de projet.