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Comment communiquer pour lutter contre l’agribashing

Covid-19 oblige, le grand débat du Space sur le thème « Impossible pédagogie : comment connecter les consommateurs et les éleveurs » était retransmis, ce mercredi 16 septembre, sur Youtube. L’occasion de monter l’importance de la communication aujourd’hui et de dégager certaines règles pour bien communiquer.
Les Français aiment bien les agriculteurs mais pas leurs modes de production. C’est en tout cas ce qu’affirme les sondages BVA.
« Et le taux de mauvaise opinion augmente avec une méconnaissance de l’agriculture, appuie Florence Gramond, directrice chez BVA, spécialiste de l’agriculture depuis 25 ans, lors d’un débat organisé par le Space et retransmis par Youtube le 16 septembre dernier. Malgré cette ignorance, cela ne les empêche pas d’avoir un avis. »
Gabrielle Dufour, chargée des partenariats chez Datafarm, qui avoue avoir eu une vision manichéenne de l’agriculture est le parfait exemple d’une personne qui grâce à sa curiosité s’est intéressée aux agriculteurs, a découvert le monde agricole et va jusqu’à les défendre sur son compte Twitter.
Par ailleurs, les médias et les réseaux sociaux donnent une vision déformée des comportements des consommateurs. Toujours selon BVA, les végétariens qui pratiquent ce mode de consommation tous les jours ne représentent que 4 % de la population et les végans 2 % seulement. En revanche, BVA confirme les attentes des consommateurs : le développement d’une agriculture locale et écolo (47 %) ainsi qu'une participation aux décisions de la PAC (30 %). Les deux heures de discussions sur le thème « Impossible pédagogie : comment connecter les consommateurs et les éleveurs » a permis de dégager des solutions pour faire évoluer les mentalités.
Communiquer, communiquer…
Communiquer auprès du consommateur devient le leitmotiv des spécialistes. Hervé Le Prince, fondateur de l’agence de communication rennaise Newsens, qui travaille pour l’association les Agriculteurs de Bretagne, organisateur de ce débat avec le Space, affirme d’emblée :
« Je suis d’accord avec Jean-Marie Séronie qui affirme que l’agribashing est une chance pour l’agriculture car les consommateurs viennent de comprendre que leur santé est liée à ce qu’ils mangent. »
Et avec conviction, il s’adresse aux agriculteurs :
« La communication devient stratégique pour votre avenir. Il ne faut plus être défensif. »
L’agriculteur qui communique doit être sincère et honnête. Étienne Fourmont, éleveur laitier, s’est pris au jeu de la communication sur les réseaux sociaux.
« Il faut avoir envie de le faire, relève-t-il. J’explique ce que je fais notamment sur Twitter, un réseau qui me correspond bien, rapide avec des échanges sur lesquels on ne revient pas comme sur Facebook. Mais le jeu en vaut la chandelle. J’ai peu de retours négatifs, peut-être 5 à 10 % des messages sur Twitter. Et sur Youtube, j’ai même 98 % de réponses très positives. »
L’éleveur qui compte 85 vaches laitières consacre beaucoup de temps à communiquer : 2 à 3 heures par jour, et pour une vidéo de 5 à 10 minutes, cinq à six heures sont nécessaires (il en publie une fois par semaine sur Youtube). Il twitte même en travaillant.
Chacun son style
Chaque éleveur trouve son style et le réseau qui lui convient le mieux. Dominique Gautier, éleveuse porcine préfère Facebook.
« J’ai toujours aimé communiquer, affirme-t-elle, avec les voisins, avec les élus. Chaque projet leur est exposé. Ce qui fait que nous n’avons jamais rencontré de problèmes pour les développer. Mais c’est un travail au quotidien. Ce sont les Agriculteurs de Bretagne qui m’ont convaincu d’aller sur les réseaux sociaux. Ma première prestation a très bien marché. J’ai profité de la coupe du monde de foot pour faire de l’humour, des ballons dans une case de porcelets. »
Les portes ouvertes aussi
Hervé Le Prince insiste sur les règles à respecter :
« En parlant de son travail, on s’adresse aux consommateurs et non aux détracteurs. Car sont les agriculteurs qui leur apportent la meilleure réponse. »
Les portes ouvertes sont aussi un bon moyen de communiquer et de médiatiser l’événement.
« Avec Agriculteurs de Bretagne, relate Dominique Gautier, nous organisons une porte ouverte le même jour dans une vingtaine de fermes. Cela donne l’occasion de l’annoncer dans la presse et de se faire aider. C’est ainsi que nous avons reçu 1 000 personnes en un seul jour. Et 100 bénévoles ont été là pour nous épauler. »
Manipulation autour du bien-être animal
Le débat s’est focalisé aussi sur le lancement du référendum d’initiative partagée (RIP) sur le bien-être animal. Gabrielle Dufour s’insurge :
« Comment ne pas le signer ? Comment ne pas être pour contre la maltraitance ? Dans ma jeunesse, je l’aurais sûrement signé. Mais il comporte trop d’amalgames. Sur le même plan sont accusés la recherche sur les animaux, la fabrication des fourrures, le cirque et l’agriculture ! »
Dominique Gautier réagit aussi vivement : « Si ce RIP passe, les élevages hors sols seront fermés. Nous, on fait quoi ? Ce n’est pas une solution. Nous devons communiquer pour montrer que nous évoluons constamment dans la façon de produire ! » Et Etienne Fourmont est sur la même longueur d’onde : « Ce RIP est un moyen formidable de communication pour les antispécistes, de la manipulation. Qui est pour la souffrance des animaux ? En attendant , c’est aussi une façon de contraindre l’élevage pour qu’il ne soit plus sur le territoire français ! »



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