Avec le développement de la mondialisation et le progrès technique, les facteurs exogènes (climat et épizootie) sont toujours d’actualité mais sont aujourd’hui amplifiés par les facteurs endogènes (financiarisation et spéculation). Ainsi les marchés agricoles sont plus volatils et leur anticipation plus complexe. Ils ne sont plus seulement des lieux de confrontation de l’offre et de la demande. Les retournements de prix sont de plus en plus difficiles à anticiper et leur fréquence a doublé pour la plupart des produits agricoles.
D'autre part, les risques auxquels sont exposés les marchés sont de moins en moins mutualisables, dans la mesure où tous les producteurs d’une zone sont exposés au même risque au même moment. La volatilité est donc difficilement assurable par le privé.
Bastien Guibert souligne :
La volatilité implique pour les agriculteurs de se prémunir contre ses effets à l’aide notamment des politiques publiques de gestion des risques. En effet, elle n’est pas gérable individuellement. Dans la durée, il s’avère impossible pour les producteurs agricoles de gérer seuls ces variations de prix.
Le farm bill américain vs la nouvelle PAC
Jean Cordier, professeur à l’Agrocampus Ouest, a comparé deux lois agricoles entrées en vigueur au même moment : le nouveau Farm Bill mis en place par les États-Unis et la dernière PAC de l’Union européenne.Selon lui, si ces deux politiques de gestion des risques poursuivent le même objectif, c’est-à-dire faire face à la variabilité des revenus agricoles, leur mise en œuvre et les outils dont elles disposent diffèrent d’un cas à l’autre. Jean Cordier explique :
Alors que l’Union européenne mise tout sur l’aide directe au revenu (72% en termes de budget, versus 5% pour les filets de sécurité et 1% pour les instruments privés type assurance marge), les États-Unis préfèrent jouer sur les instruments privés (47% en termes budgétaires, versus 23% pour les filets de sécurité et 0% pour l’aide directe au revenu).
Le système d’aide contracyclique du Momagri
Jacques Carles, délégué général Momagri, explique qu’actuellement l’Union européenne va à l’encontre des grandes stratégies agricoles mondiales. Selon lui :L’ensemble des acteurs sur le marché ont renforcé leurs soutiens publics à destination de leur agriculture (+89% en US$ par habitant entre 2008 et 2012 pour la Chine, +40% pour les États-Unis, +16% pour le Brésil). De son côté, l’Union européenne a enregistré une baisse de 17% sur la même période.
Ce dispositif serait ainsi régulé pour les produits laitiers : un tunnel de variation libre des prix serait défini à partir de leur prix de revient. Lorsque les prix oscillent dans ce tunnel, seule une aide de sécurité alimentaire de 75€/ha serait versée par le budget de la PAC.
Si le prix baisse et sort du tunnel de prix défini, jusqu’à un seuil de régulation publique, l’exploitant touche une aide contracyclique du budget européen l’incitant au stockage privé.
Si le prix passe en dessous du seuil de régulation publique, la Commission européenne procède à des achats publics pour constituer des stocks (système de l’intervention).
À l’inverse, si le prix de vente dépasse le seuil de solidarité financière, tous les opérateurs effectuant des transactions sur ce marché payent une taxe venant abonder les recettes du budget communautaire, participant à limiter les phénomènes de spéculation.
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