La Pac peut-elle s'inspirer du Farm Bill américain ?

Une exploitation agricole du Sud-Dakota, États-Unis. Crédit photo : C. Waligora/Pixel Image
David Salmon, attaché agricole à l'ambassade des États-Unis en France, était invité à la table ronde organisée au dernier Space par Coop de France Ouest, sur le thème "Pac 2014-2020 : guichet ou politique ?"
Sa présentation du Farm Bill visait à ouvrir le débat sur la Pac, et à voir en quoi l'Europe pouvait s'inspirer des États-Unis en matière de politique agricole, notamment sur l'aspect gestion des risques.

Les nouvelles orientations de la Pac présentées par François Hollande le 2 octobre 2013 au Sommet de l'élevage, ne disent en effet pas grand-chose de l'amélioration des instruments de prévention et de gestion des risques, si ce n'est que "les crédits nécessaires seront pris sur le premier pilier".

Le système américain des aides à l'agriculture, le Farm Bill, est renégocié tous les 5 ans. Le Farm Bill en cours se terminait fin septembre 2013 et devait laisser place à un nouveau Farm Bill, ou à une extension du système en place, ou à son expiration.

L'expiration du Farm Bill, si aucun accord n'est trouvé au congrès entre le Sénat et la Chambre des représentants, signifie un retour aux années 1930 quand il n'y avait pas de politique agricole ! souligne David Salmon.

Le Farm Bill, c'est un peu la Pac et les Restos du cœur à la fois ! a plaisanté Virginie Allaire-Arrivé, directrice de Coop de France Ouest.

En effet, sur les dix dernières années, 78% du budget du Farm Bill a été consacré à l'aide alimentaire (food stamps), soit 764 milliards de dollars. Les sommes consacrées au soutien à l'agriculture s'élèvent en parallèle à 84 milliards de dollars pour les assurances récolte, auxquels s'ajoutent 59 milliards d'aides directes, ainsi que 62 milliards pour des mesures de protection de l'environnement.

Les assurances récolte, introduites dans le Farm Bill à la fin des années 1990, constituent donc le premier soutien à l'agriculture aux États-Unis. L'État apporte en fait un complément à des assurances récolte payées en partie par les agriculteurs eux-mêmes. D'après David Salmon, la tendance est d'aller de plus en plus vers ce type de soutien, et d'abandonner progressivement les aides directes.

C'est le résultat des prix élevés des céréales récemment, indique-t-il. Les aides directes aux agriculteurs, non liées à la production, sont de plus en plus difficiles à justifier vis-à-vis de l'opinion publique.

Aujourd'hui, une entente est nécessaire au Congrès américain, entre le Sénat (contrôlé par les démocrates) et la Chambre des représentants (contrôlée par les Républicains), pour définir un nouveau Farm Bill. Or, ces deux parties, de tendances politiques différentes, ne voient pas l'avenir du Farm Bill de la même façon.

La principale différence concerne la part à consacrer à l'aide alimentaire : le Sénat veut la réduire de 4 milliards de dollars tandis que la Chambre des représentants veut la réduire de 20 milliards (sur 10 ans).

Concernant le soutien à l'agriculture, les deux parties font les mêmes propositions : réduction des aides directes, réduction des mesures de protection de l'environnement, augmentation du budget consacré à l'assurance récolte.

L'avantage de l'assurance récolte est qu'elle ne coûte qu'en cas d'accident climatique, conclut David Salmon. Les fonds nécessaires peuvent donc être très différents d'une année sur l'autre. C'est aussi une difficulté par rapport au budget global de l'État. Ainsi, la sécheresse de l'année dernière va coûter entre 12 et 20 milliards de dollars.



Autour de la table ronde, les intervenants ont réagi à cette présentation du Farm Bill.
Christian Pees, président du Cogeca :

Je pense que ce type de politique doit en effet se substituer aux aides directes, d’autant plus que c’est compatible avec l’OMC. En Europe, nous abordons cela du bout des doigts. Or, la volatilité des cours peut être beaucoup plus impactante que la variation des aides de la Pac : mon regret est que cette Pac ne prend pas suffisamment en compte la volatilité comme caractère désormais endogène de l’agriculture.

Hubert Garaud, président du pôle animal de Coop de France :

Nous devons nous inspirer du Farm Bill pour la Pac d’après 2020. La Pac doit soutenir l’activité économique, pas alimenter des rentes !

Michel Morin, vice-président du conseil régional de Bretagne, chargé de l’agriculture :

Pour l’après 2020, les Régions préféreraient aussi une Pac contra-cyclique qui épouse la volatilité.

Agnès Le Brun, députée européenne :

C’est un changement de philosophie, qui permettrait même de faire des économies ! Je pense que les États membres commencent à être prêts pour ce type de réflexion.




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