Les points clés pour transmettre son exploitation

« Cultivar Élevage » vous aide à y voir plus clair dans la transmission de votre exploitation. CP : cherryandbees/Adobe Stock

La transmission de l’exploitation agricole est une étape unique et capitale dans la vie de l’entreprise et de son dirigeant, qu’il convient de préparer et d’organiser avec soin. Comment l’anticiper ? Comment trouver un repreneur ? Quelles seront les incidences fiscales ? Quels sont les outils juridiques pour transmettre ? « Cultivar Élevage » livre les points clés qui aident à aborder les différentes phases de votre projet et permettent de franchir ce tournant décisif dans les meilleures conditions. 

Réussir la transmission de l’exploitation, c’est avant tout savoir anticiper et bien se préparer. Il est primordial de penser son projet et d’en parler à son entourage bien en amont, de s’informer sur l’âge auquel on pourra bénéficier de la retraite, de se renseigner sur ce qu’il faut entreprendre pour changer de métier (bilan de compétences, formations à entamer...), d’élaborer des scenarii de transmission et de prendre contact auprès d’interlocuteurs dédiés. Certaines démarches administratives, juridiques et fiscales sont incontournables. Sur ce point, les chambres d’agriculture conseillent de respecter un calendrier prévisionnel établi.

Préparer sa retraite pas à pas 

• J - 5 ans : 5 à 10 ans avant son départ, l’exploitant doit déjà réfléchir à son projet de vie après la transmission, à la façon dont il souhaite céder son actif et au potentiel de transmission de son installation (bâtiments, surface agricole...).Il peut aussi demander son relevé de carrière à la MSA. 

• J - 3 ans : à ce stade, l’agriculteur a déjà l’obligation de faire parvenir sa déclaration d’intention de cessation d’activité (Dicaa) à la chambre d’agriculture dont il dépend. Il est nécessaire de faire évaluer l’exploitation.

• J - 2 ans : l’exploitant doit formaliser son projet de transmission et se concentrer sur la recherche d’un repreneur. Il peut aussi commencer à étudier ses droits à la retraite avec la MSA. 

• J - 1 an : le moment est venu de réaliser une évaluation de l’exploitation (diagnostic de reprenabilité...), d’étudier les dispositifs d’aides à la transmission, de résilier les baux et de prévoir le futur lieu d’habitation lorsque la maison est transmise avec l’exploitation. C’est aussi la date limite pour informer les propriétaires du départ en retraite.

• J - 6 mois : l’exploitant doit déposer les demandes d’aides à la transmission.

• J - 4 mois : l’exploitant doit déposer à la MSA le dossier de demande de retraite. 

• J - 1 mois : il doit prévoir les formalités comptables du dernier exercice 

Après la cessation : une fois la transmission effective, l’exploitant agricole doit adresser le plus tôt possible sa déclaration de cessation d’activité au CFE (Centre de formalités des entreprises) de la chambre départementale d’agriculture. 

Trouver un repreneur 

Dans de nombreuses situations, la transmission de l’exploitation se réalise dans le cadre familial : l’un des enfants ou un proche parent reprend l’exploitation familiale en totalité ou partiellement. 

Lorsqu’il n’y a pas de successeur familial et que le futur cédant souhaite transmettre son exploitation à un jeune agriculteur, il lui faut trouver un repreneur. Une tâche qui n’est pas toujours aisée ! Pour cela, il peut se faire accompagner par différents organismes. 

Pas de repreneur dans le cadre familial ? Des solutions : 

L’une des solutions pour l’exploitant consiste à s’inscrire au Répertoire départ installation. Géré par les chambres d’agriculture départementales et animé par des conseillers, cet outil national permet la mise en relation des exploitants désireux de trouver un repreneur et des candidats à l’installation. En plus d’assurer une large diffusion de toutes les offres disponibles (plus de 1 700 offres publiées chaque année), le dispositif permet au cédant de bénéficier d’un accompagnement individuel pour mener à bien la transmission de l’exploitation. Définition du profil du repreneur, information sur les aides possibles, choix du mode de cession, modalités financières... l’exploitant profite d’un suivi jusqu’à la conclusion de la transaction. 

Une autre possibilité consiste à se rapprocher de la Safer (Société d’aménagement foncier et d’établissement rural) de sa région. Chargé de chapeauter les installations agricoles, notamment pour assurer la transparence du marché foncier rural, cet organisme offre aussi un accompagnement individuel juridique, social et financier, notamment en utilisant la convention de mise à disposition (CMD), l’intermédiation locative et la négociation entre les différents partenaires du cédant.

L’exploitant peut aussi se rapprocher de l’association Terre de liens qui propose un accompagnement individuel pour une mise en relation avec des porteurs de projets, rechercher des solutions pour le rachat du foncier agricole, outils spécifiques d’acquisition de foncier agricole. D’autres partenaires – notaire, centre de gestion, juriste... – peuvent aussi aider dans la recherche de repreneur. 

Clarifier les aides financières et les incitations

Plusieurs aides sont mises en place pour soutenir le cédant (et le repreneur) d’une exploitation agricole.
• Le contrat de génération : il s’agit d’une aide spécifique pour l’exploitant agricole, âgé de 57 ans au moins, qui emploie un salarié ou un stagiaire hors du cadre familial dans la perspective de lui transmettre son exploitation. L’aide peut atteindre jusqu’à 4 000 euros/an pendant trois ans.

• Le programme pour l’accompagnement à l’installation-transmission en agriculture (Aita) : dans l’objectif de favoriser le renouvellement des générations en agriculture et notamment les installations hors du cadre familial, le programme Aita définit les aides financières à destination des futurs cédants et des propriétaires bailleurs dont la mise en place varie selon les politiques régionales d’installation-transmission. En voici quelques exemples.

• La prise en charge partielle du conseil d’accompagnement en amont de la transmission : il s’agit d’une aide destinée à anticiper les départs et participer à la mise en place de conditions favorables pour la transmission de l’entreprise : jusqu’à 1 500 € selon les régions, dans la limite de 80 % des dépenses engagées.

• L’inscription au Répertoire départ installation : cette aide vise à encourager les futurs cédants à s’inscrire au RDI pour rechercher un jeune repreneur et éviter que les terres libérées ne servent à l’agrandissement d’exploitations existantes : jusqu’à 4 000 euros selon les régions. La prise en charge partielle du diagnostic d’exploitation à céder : l’aide a pour objectif d’encourager la réalisation d’un diagnostic de l’exploitation à céder quand cet audit est nécessaire pour faciliter la démarche de transmission-installation : jusqu’à 1 500 euros selon les régions, dans la limite de 80 % des dépenses engagées.

• L’aide location habitation et/ou bâtiments : elle est destinée à encourager un agriculteur quittant l’agriculture en transmettant ses terres à un jeune qui s’installe, à lui louer la partie « habitation » du siège d’exploitation et/ou les bâtiments : jusqu’à 5 000 euros

• L’aide à la transmission globale du foncier : ce dispositif a pour objectif de soutenir l’implication du futur cédant auprès des propriétaires fonciers afin qu’une transmission complète de l’exploitation soit faite auprès du repreneur : jusqu’à 3 000 euros selon les régions et selon la part de foncier transmise. 

• L’aide au bail : adressée uniquement aux propriétaires fonciers n’exerçant pas d’activité agricole, elle encourage à la location de l’exploitation au profit d’un jeune agriculteur. 

Estimer la valeur de son exploitation 

L’évaluation du prix de la ferme est une étape incontournable de la transmission, qu’elle soit réalisée dans le cadre familial ou hors cadre familial. Elle permet de trouver un juste prix entre le cédant et le repreneur afin d’éviter tout risque de litige et de sécuriser la transmission par rapport à l’administration fiscale. L’évaluation doit être anticipée et suppose idéalement de démarrer la réflexion plusieurs années à l’avance. Afin de mener à bien cette étape, il est nécessaire de s’entourer de l’avis d’experts. Différentes méthodes d’estimation du prix d’une ferme peuvent être employées, les plus couramment utilisées étant la valeur patrimoniale, la valeur de rentabilité et la valeur de reprenabilité. 

La valeur patrimoniale correspond à la valeur vénale des biens pris individuellement sur le marché. Cette méthode prend en compte l’ensemble des actifs de l’exploitation (foncier, bâtiment, matériel, maison d’habitation...). La somme de l’ensemble des évaluations aboutit à la valeur patrimoniale de l’exploitation. L’estimation du matériel peut être réalisée par un professionnel reconnu (concessionnaire...) par le cédant et le repreneur. L’évaluation des bâtiments dépendra de leur degré de vétusté, en appliquant au tarif « bâtiment neuf » une décote liée à l’âge et à l’état du bâtiment. Pour les stocks, on retient le montant estimé sur la base de leur valeur comptable au cours du jour. Pour l’estimation des avances aux cultures, le prix d’achat des intrants et le coût forfaitaire pour les travaux culturaux sont combinés pour obtenir la valeur finale. Cette méthode exclut les droits incorporels (DPB...) qui n’ont pas de valeur marchande.

La valeur de rentabilité (ou valeur économique) est une estimation de l’outil de production à partir des résultats qu’il permet de dégager et de l’évolution prévisible de son environnement économique. Concrètement, il s’agit du prix maximum pour que le repreneur puisse vivre de son travail et réaliser des prélèvements privés, se dégager une marge de sécurité et rembourser ses emprunts. La valeur est calculée d’après la moyenne des résultats économiques (EBE) obtenus par le cédant sur les trois à cinq années précédentes. Cette valeur intègre l’ensemble des biens corporels contribuant à la réalisation du résultat (bâtiments, matériel, stocks, parts sociales) et l’ensemble des biens incorporels. La valeur de reprenabilité dépend, pour le repreneur, de sa capacité à rembourser les fonds empruntés pour permettre l’acquisition de l’entreprise. 

Connaître les outils juridiques pour organiser la transmission

Les modalités de transfert du capital d’exploitation et du patrimoine familial doivent être étudiées assez tôt car elles engagent le cédant et le repreneur pour de longues années. Différentes solutions s’offrent au cédant, chacune étant soumise à ses propres règles. L’agriculteur peut opter pour la vente d’un bien ou de parts sociales, ou bien pour la location : il peut choisir de rester propriétaire et de louer son exploitation à un tiers, notamment via un bail à ferme de neuf ans, un bail à long terme ou encore un métayage.
La transmission de l’exploitation à un membre de sa famille peut se faire sous la forme d’une donation. Elle permet d’organiser de son vivant et de manière active sa succession en associant les héritiers à la transmission de son patrimoine. Il en existe plusieurs types. En présence de plusieurs enfants, la donation-partage permet d’attribuer tout ou partie de l’exploitation au successeur. Celui qui hérite de l’exploitation doit généralement payer des soultes à ses frères et sœurs. La donation peut intéresser un seul d’entre eux dans le cadre d’une donation simple. 

L’acquisition ou la gestion des biens peut se réaliser de manière individuelle ou collective : création d’un groupement foncier agricole (GFA) pour les terres familiales, d’une société civile immobilière (SCI) pour les immeubles, d’une société pour le capital d’exploitation. Il est également possible de déclarer un fonds agricole qui prend en compte l’ensemble des biens transmissibles y compris les biens incorporels. 

Connaître l’impact fiscal de la cession 

La fiscalité liée à la transmission est un point à ne pas négliger, car il s’agit d’une opération dont la charge fiscale peut être lourde, et qui peut être dissuasive pour le cédant, en raison : 

  • des plus-values générées par la cession (les biens du patrimoine professionnel agricole sont soumis au régime commun des plus-values professionnelles au moment de la cession) ; 
  • des réintégrations fiscales (les déductions fiscales, lors du départ à la retraite, peuvent se trouver réintégrées dans le bénéfice de l’exploitation et engendrer ainsi une importante source d’imposition) ; 
  • de l’augmentation du patrimoine privé liée à la vente de biens professionnels ;
  • de la revalorisation des stocks...
Les pouvoirs publics ont mis en place des dispositifs qui peuvent permettent de réduire l’impact fiscal de la transmission : pacte d’associés, donation familiale avant cession, mise en place d’une holding, exonérations de plus-values professionnelles... 


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