Toujours pâturer de l’herbe jeune

« Le coup de talon » permet de déterminer l’entrée des animaux dans une pâture. Photo: H. Grare / Pixel Image

« L’herbe pâturée, une ressource sous-estimée » était le thème d’une journée technique organisée par le GDSB des Ardennes, Ardennes conseil élevage et la chambre d’agriculture des Ardennes le 31 janvier dernier. À cette occasion, Didier Deleau, ingénieur régional fourrages à la station expérimentale Arvalis-Institut du végétal de Saint-Hilaire-en-Woëvre, a rappelé quelques notions économiques sur l’herbe pâturée :

Le prix de l’herbe pâturée est 4 à 5 fois moins cher qu’un fourrage récolté. Elle est 9 à 10 fois moins onéreuse qu’un concentré. Obtenir 1 kg de GMQ pour un couple mère-veau ou une génisse revient à 0,20 euros au pâturage contre 1,60 euros au bâtiment.

Or l’herbe est souvent mal valorisée dans les élevages. Joël Martin, animateur régional de la filière bovins viande en Champagne-Ardenne, cite le résultat d’un suivi mené sur 329 ferme de la région :

Seulement 1/3 des fermes suivies valorise bien les prairies avec une production d’herbe supérieure à 6 tMS/ha/an. La moitié de l’échantillon produit moins de 5,5 tMS/ha d’herbe/an. Enfin, 36 % des fermes valorisent moins de 5 tMS/ha/an. Les fermes suivies étant sensibilisées à la gestion de l’herbe, on peut supposer que la valorisation de l’herbe est moins bonne encore en moyenne.

Qui dit moindre valorisation de l’herbe dit achat de fourrages complémentaires ou moins d’animaux produits. Ce qui signifie un manque à gagner. Une meilleure valorisation passe notamment par le pâturage et particulièrement par un bon pilotage.

Pâturer tôt…

L’herbe jeune est riche et appétente. Ce qui signifie moins de complémentation et moins de refus. Il convient de la valoriser au maximum. Cela impose d’abord de bien connaître la production d’une prairie estime Didier Deleau :

Le rapport limbe/gaine des graminées est toujours égal à 3. C’est-à-dire qu’une talle ne produit jamais plus de 3 feuilles. La production d’une quatrième feuille coïncide avec la sénescente d’une autre. L’apparition de la troisième feuille et donc un stade repère pour la pâture d’une prairie. Il correspond à une hauteur d’herbe de 8 cm à l’herbomètre. Il est également le signal que la plante a reconstitué ses réserves nécessaire au développement d’une première feuille après récolte.

Il ne faut pas attendre beaucoup plus avant de faire pâturer. Au-delà de 11 cm à l’herbomètre, l’herbe monte, est plus vieille, moins appétente et sa valeur nutritive chute. Pour une bonne croissance des animaux au pâturage, il faut donc veiller au stade des graminées.

D’après des essais menés par Arvalis-Institut du végétal sur 700 veaux entre 2000 et 2012, une bonne gestion du pâturage peut engendrer un GMQ de l’ordre de 1 499 g/j pour des veaux mâles et 1 355 g/j pour des veaux femelles.

Pour se faire, la mise à l’herbe des animaux est une étape importante qu’il convient de raisonner selon des critères à étudier dans l’ordre suivant :

  • la portance du sol : Pour l’apprécier, « le coup de talon » est une méthode efficace. Si le talon s’enfonce de moins de 5 cm après un coup vif sur le sol, sa portance est suffisante;
  • les prévisions météo du jour de la mise à l’herbe et des suivants (température, humidité, pluviométrie);
  • le statut des animaux (génisses 2 ans, bœufs > génisses 1 an > vaches + veaux);
  • la hauteur et la croissance de l’herbe. Plus la mise à l’herbe est précoce, plus le chargement est faible. Mais 8 à 10 cm d’herbe suffisent à un chargement de 35 ares/UGB. Si l’herbe se fait rare, un déprimage pour fauche tardive peut être envisagé.

Il est à noter que la quantité d’herbe présente est le dernier des critères à prendre en compte. Il conviendra toutefois de bien la gérer ensuite pour ne pas être débordé au printemps et ne pas en manquer durant l’été.

…Et tard

Le pâturage très précoce de printemps est loin de pénaliser la production d’herbe d’une prairie, bien au contraire. Gérer via un pâturage tournant – 5 à 6 parcelles en bovins viande, 8 à 10 en bovins lait – permet de toujours disposer de jeune herbe à proposer aux animaux. Mais le pâturage de printemps de doit pas occulter celui d’automne indique Didier Deleau :

Pour éviter un redémarrage lent et difficile au printemps suivant, il est essentiel de sortir les animaux d’une prairie dès que la hauteur d’herbe atteint 5 ou 6 cm. Outre ce prérequis, il ne faut pas sous-estimer la qualité d’une herbe d’automne. Elle est proche d’une herbe de printemps et la pousse peut encore être importante.

Entre le 9 septembre et le 8 octobre 2015, la ferme de Saint-Hilaire en Woëvre parvenait à des croissances de 1 501 g/j pour des broutards.

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