Troubles musculosquelettiques : les exosquelettes ne sont pas une panacée

Les exosquelettes sont des dispositifs mécaniques ou textiles. Ils apportent une assistance physique grâce à des systèmes élastiques ou à ressorts. Photo : Céline Collet - Chambre d'agriculture de Normandie
Les exosquelettes sont arrivés sur le marché depuis quelques années, avec comme promesse de réduire la pénibilité du travail et les TMS. Et s’ils peuvent effectivement représenter une piste dans certains cas, la solution miracle n’existe pas, et l’investissement dans un exosquelette doit être mûrement réfléchi.

Selon la MSA, les troubles musculosquelettiques (TMS) représentaient 93,3 % des maladies professionnelles en agriculture en 2016. Ces troubles sont le résultat de la combinaison de multiples causes : répétitivité des gestes, postures contraignantes, efforts, stress, organisation du travail, climat social dans l’entreprise. Or, « certaines entreprises ont eu tendance à ne considérer que le volet physique des TMS, et à ne chercher des solutions que par ce prisme », explique Jean-Jacques Atain Kouadio, expert assistance à l’INRS. Parmi ces solutions, les exosquelettes. Ce sont des dispositifs mécaniques ou textiles, peu sont robotisés, revêtus par le travailleur. Ils visent « à lui apporter une assistance physique, par un principe de restitution de l’énergie mécanique rendu possible grâce à des systèmes élastiques ou à ressort », indique l’INRS dans sa brochure "10 idées reçues sur les exosquelettes". Et s’ils peuvent apporter une véritable aide dans certaines situations, ils ne sont pas pour autant une panacée.

Une assistance très localisée

« Les exosquelettes présents sur le marché aujourd’hui assistent les mouvements de manière très localisée, rappelle Jean-Jacques Atain Kouadio, qui travaille sur ce sujet depuis plus de dix ans. C’est-à-dire qu’un exosquelette qui vous aide à lever les bras verticalement ne vous aidera pas forcément si vous effectuez une rotation du corps ou si vous vous baissez, par exemple. Il pourra même s’avérer contraignant. » De plus, avec un exosquelette, la contrainte physique ne disparaît pas, « elle est répartie ailleurs sur le corps. Cela peut s’avérer bénéfique, si elle est bien distribuée, mais des problèmes peuvent également surgir à d’autres endroits », explique l'expert de l'INRS. En outre, bien que les concepteurs aient déjà considérablement diminué le poids de leurs produits, « passant de 8 kg il y a une dizaine d’années à 1,2 kg aujourd’hui pour un exosquelette d’assistance des membres supérieurs », selon l’expert, l’exosquelette reste une charge et les points de contention peuvent devenir sources de gêne, de frottement, d’irritation.

Les exosquelettes ne sont pas pour autant bons à jeter à la poubelle. Pour Jean-Jacques Atain Kouadio, « c’est une solution à envisager après que d’autres leviers ont été engagés. En effet, lorsqu’il existe un problème de TMS, il faut d’abord étudier l’activité de travail dans son ensemble, repenser son organisation, les tâches à effectuer, mais aussi l’aménagement de l’espace de travail. Ensuite, s’il reste un besoin d’assistance physique sur certaines tâches, l’intégration d’un exosquelette peut s’envisager ». Un constat partagé par Céline Collet, en charge du projet Exotraite à la chambre d’agriculture de Normandie : « Comme l’exosquelette est porté par le trayeur, il ajoute forcément une forme de contrainte. Alors, il est essentiel d’adapter d’abord la salle de traite, ou encore de répartir les traites entre plusieurs trayeurs si c’est possible, avant d’investir dans ce type de matériel. Il faut aussi s’assurer qu’il n’y a pas de contre-indications médicales au port de l’exosquelette pour le trayeur. »

Prendre du temps

Si après l’analyse de l’activité et les aménagements en découlant, un besoin d’assistance physique persiste, une deuxième phase s’amorce : caractériser ses besoins et choisir un exosquelette. « Comme chaque exosquelette assiste de manière très précise un type de mouvement, il faut bien définir sur quel mouvement on a besoin d’être aidé. Dans le cas contraire, l’investissement dans un exosquelette sera un échec », insiste Jean-Jacques Atain Kouadio. Une fois le besoin défini, il s’agira d’élaborer un cahier des charges et d’explorer le marché des exosquelettes, à la recherche de la perle rare. « Il est parfois possible, en échangeant avec les concepteurs, d’adapter un outil existant ou d’en créer un répondant à ses problématiques », ajoute l’expert assistance. Enfin, la dernière phase, primordiale, concerne la formation et la familiarisation à l’outil. « Le temps d’apprentissage peut être assez long, mais il est nécessaire, estime Jean-Jacques Atain Kouadio. Il faut prévoir un temps de formation en dehors de la situation de travail, pour se familiariser avec l’outil, voir s’il est adapté au gabarit de celui ou celle qui va le porter, effectuer des réglages. Ensuite, l’exosquelette pourra être testé en situation de travail, et c’est là que les personnes pourront voir s’il est pratique, et s’il leur apporte plus de bénéfices que de gêne. À la fin de cette phase de test, il sera nécessaire de faire le bilan, et de décider si on adopte ou non l’exosquelette. » Dans le cadre du projet Exotraite, la phase de test était d’un mois. Céline Collet appuie l’importance de tester les exosquelettes sur un temps long pour « dépasser l’euphorie de la découverte d’une nouvelle technologie et vraiment estimer l’impact de l’outil sur soi et son travail. De plus, la première semaine, il y a eu beaucoup de réglages à réaliser, les conseils prodigués par les différents fournisseurs n’étant pas de la même qualité ».

Pour en savoir plus sur les exosquelettes et les critères de choix, des brochures sont disponibles gratuitement sur le site Internet de l’INRS
La MSA Marne Ardennes Meuse a également réalisé une vidéo sur le sujet.



Cet article est issu du dossier Ergonomie en bâtiment : améliorer le confort de travail paru dans le numéro d'octobre 2022 de Cultivar élevage. Vous pouvez l'y retrouver en intégralité ainsi que d'autres articles sur le sujet.
 

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