En Gironde, il s’installe malgré la crise viticole

Jean-Guillaume de Giacinto dans son chai.

Jean-Guillaume de Giacinto élève ses vins dans des contenants en grès, en porcelaine ou en terre cuite.

Crédit photo Benoît Guenot
À l'âge de 39 ans, Jean-Guillaume de Giacinto a repris le domaine familial situé en Sud-Gironde, dans le Réolais. Le défi est de taille alors que le vignoble bordelais connaît une crise économique le forçant à arracher environ 8.000 ha. Mais le jeune vigneron parie sur des vins élevés dans des contenants en grès, en porcelaine ou en terre cuite pour réconcilier les consommateurs avec les vins de Bordeaux.

Jusqu’en 2019, de son propre aveu, Jean-Guillaume de Giacinto avait « un rythme de vie plutôt sympa ». Commercial dans le vin depuis presque 15 ans, habitant le centre-ville de Bordeaux, marié, père de deux enfants, il aurait pu conserver ce confort de vie. Si ce n’était ce domaine de 25 ha situé à une soixantaine de kilomètres au sud de Bordeaux et acheté par ses grands-parents originaires d’Italie.

En fermage depuis les années 1960, l’exploitation comprend de la vigne, des bois et de la prairie. En 2019, quand le fermier d’alors annonce à Jean-Guillaume de Giacinto qu’il souhaite s’en aller, la nouvelle fait écho en lui. « J’avais l’impression d’avoir fait le tour du commerce et j’avais envie de passer du côté de la production, se souvient le vigneron. Quand je me suis lancé, les réactions ont été mitigées, surtout du côté de ma femme, mais aujourd’hui, je suis très soutenu par ma famille et mes amis. »

Que de la bouteille 

Lorsqu’il s’installe en 2021, la crise girondine commence à poindre, mais il s’est déjà trop engagé pour faire machine arrière. Après avoir quitté son entreprise, l’ex-commercial a suivi le master Management de domaine viticole de Bordeaux Sciences Agro. Une année à se former aux bases de la viticulture et de l’œnologie, à prendre conseil auprès des intervenants, à réaliser un stage et à affiner son modèle économique.

« Aujourd’hui, ce qui est viable pour les petites propriétés, c’est de ne faire que de la bouteille, analyse Jean-Guillaume de Giacinto, qui exploite en bio 8,5 ha de vignes. Le modèle d’avant, où l’on vendait une partie en cave coopérative et l’autre partie en bouteille, cela ne marche plus. » Le domaine Le Trébuchet ne fait donc que de la vente en bouteille en son nom propre. Il fournit la CHR et les cavistes locaux en direct et par des agents, et fait appel à des grossistes pour le reste de la France.

« Rassurer les Bordelais »

À l’intérieur des quilles, les vins ont été élevés dans des amphores en porcelaine, en terre cuite ou en grès. « Bordeaux a une image beaucoup moins “fun” que d’autres régions, reconnaît le vigneron. Je voulais donc proposer quelque chose de différent, qui ne soit pas boisé, qui garde une trame fruitée avec une certaine tension et qui puisse se boire un peu frais l’été. C’est plutôt ce que recherchent les gens aujourd’hui. »

>>> Lire aussi : Quelle matière pour la cuve à vin : avantages et inconvénients de l'Inox, béton, polyéthylène, terre, grès, porcelaine, bois

Par prudence, et suivant les conseils qui lui enjoignent de « rassurer les Bordelais », il élabore également un 100 % barrique neuve. Son premier millésime a ainsi accouché de 13.000 bouteilles de vin élevé en amphores et de 7.000 autres passées par du chêne. « La cuvée barrique plaît beaucoup, et heureusement que je l’ai », admet Jean-Guillaume de Giacinto.

Début d'activité sans stock

Même avec son expérience de commercial et des produits qui cassent les codes du Bordelais, il avoue qu’il est « très compliqué » actuellement de convaincre les acheteurs de s’intéresser aux vins de Bordeaux. Trop chers, trop snobs, trop boisés, l’image renvoyée par certains grands crus déteint sur l’ensemble du vignoble. « On sent que c’est en train de changer, veut néanmoins croire le Girondin. D’autant que nous avons une carte à jouer face aux beaujolais et aux bourgognes qui sont très à la mode et qui deviennent de plus en plus chers. »

Mais tout le monde ne partage pas son optimisme : il est de plus en plus difficile pour les vignerons girondins de gagner, et de conserver, la confiance des banques. Malgré cela, Jean-Guillaume de Giacinto s’accroche, heureux d’avoir du vin à vendre après avoir dû se lancer sans stock.

Un vin blanc l'année prochaine

Seul sur le domaine, il fait appel à un prestataire pour entretenir les pieds de cabernet sauvignon, cabernet franc, merlot, malbec et petit verdot. Les vinifications, il en fait son affaire, conseillé par un œnologue rencontré au cours de sa formation à Bordeaux Sciences Agro. « Je compte arracher trois hectares pour passer à cinq hectares de vigne et obtenir le même rendement tout en réduisant mes charges, précise le vigneron. Cinq hectares en bio pour une personne, je pense que c’est faisable. »

Du côté de la gamme aujourd'hui composée de quatre cuvées, comme nombre de ses collègues, Jean-Guillaume de Giacinto constate que n’avoir que du rouge est un handicap à l’heure où les consommateurs plébiscitent les vins blancs et les vins rosés. « L’année prochaine, il me faudra un petit blanc, je ferai peut-être du blanc de noir avec du cabernet sauvignon ou du cabernet franc », prévoit celui qui, malgré la crise girondine et l’inflation provoquée par la guerre en Ukraine, garde le cap sans trébucher. 

>>> Lire aussi : Rouge, blanc, rosé : quels vins pour demain ?

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