Améliorer la qualité d’une prairie sans avoir recours à la rénovation totale

Adventices

Des essais menés en 2023 sur la ferme expérimentale de Thorigné d'Anjou montrent qu'un apport de fumier aprés un sursemis favorise la présence de graminées et réduit la part de diverses dans le couvert.

Crédit photo Léa Fréhel
La dégradation du couvert végétal d’une prairie entraîne à coup sûr une chute de la productivité. Pourtant, avant de les détruire pour en implanter de nouvelles, des solutions peuvent être mises en place pour restaurer leur potentiel. Sursemis ou rénovation par les pratiques, le diagnostic préalable identifie la méthode la plus adaptée à la parcelle.

« Si le changement climatique occasionne des dégradations sur prairies, ce n’est pas le seul facteur à détériorer la qualité du couvert, insiste Jérôme Gauchon, responsable agronomie chez Océalia. C’est pourquoi, le diagnostic prairial reste un prérequis avant tous travaux de rénovation. »

À l’occasion d’un webinaire organisé par le groupe Herbe et fourrages Centre-Val de Loire en février 2024, cet agronome a rappelé que les causes de dégradation des prairies sont souvent multifactorielles.

En effet, les accidents climatiques, le surpâturage et aussi une faible activité biologique peuvent se cumuler. Cela a pour effet d’altérer le potentiel productif, de dégrader la flore et de diminuer la part de légumineuses présentes dans le couvert.

« Une rénovation est souvent coûteuse et chronophage. Alors pour augmenter sa réussite, il est indispensable d’identifier les différents facteurs de dégradation pour éviter d’y être à nouveau confronté », assure le spécialiste d’Océalia.

L'analyse de sol, une indispensable

Il conseille de commencer ce diagnostic par une observation globale de la parcelle. C’est-à-dire de s’interroger sur la topographie, le microrelief et la nature du sol. Certains indicateurs visuels apportent des informations de haute importance.

Par exemple, les fentes de rétractation témoignent d’une teneur en argile élevée. Les turricules, eux, attestent d’une bonne activité biologique. La profondeur d’enracinement, la présence d’une semelle de labour ou des traces d’hydromorphie peuvent être mises en évidence par un simple test bêche.

Enfin, pour compléter ces observations, Jérôme Gauchon souligne le caractère indispensable d’une analyse de sol. « Cette analyse permet de vérifier la pertinence agronomique de travaux sur prairie. Ce n’est pas la peine d’engager des frais si la fertilité est absente », explique l’expert.

Classer l'état de la prairie

Le pH, le taux de saturation calcique ou encore la teneur en potasse et en phosphore sont des indicateurs qui signalent la nécessité d’effectuer un redressement calcique ou une fertilisation. Idéalement, les prélèvements s’effectuent à l’automne et en hiver, lorsque le pH est le plus stable.

« Par exemple, si l’analyse de sol montre une CEC de 9 milliéquivalents pour 100 grammes, un taux de saturation égal à 34 % et un pH de 5,2, les conditions sont défavorables à la prairie, un redressement est nécessaire avant d’entreprendre des travaux d’amélioration », assure Jérôme Gauchon.

>>> Lire aussi : Le diagnostic, un prérequis pour améliorer la productivité des prairies

L’étude du couvert prairial fournit aussi des indications essentielles pour évaluer la méthode de rénovation la plus adaptée. En effet, l’abondance d’espèces à forte valeur fourragère, le pourcentage de sol nu et la présence d’adventices déterminent le niveau de dégradation. Ces indicateurs permettent de classer l’état de la prairie selon trois niveaux : faiblement dégradée, moyennement dégradée et fortement dégradée.

Adapter le mode d’exploitation pour améliorer le potentiel

Si le pourcentage de sol nu d’une prairie est inférieur à 10 % et si l’abondance des espèces de bonne valeur fourragère est supérieure à 40 %, alors la prairie est faiblement dégradée. Une modification de pratiques peut suffire à restaurer le potentiel.

Plusieurs leviers liés peuvent alors être actionnés :

  • l’alternance fauche pâture en fait partie : elle augmente la longévité de la prairie, car cette pratique perturbe le cycle de certaines annuelles et limite leur propagation ;
  • le déprimage, qui consiste à exploiter les surfaces tôt en sortie d’hiver, favorise l’accès à la lumière du plateau de tallage des graminées : « Après déprimage, on observe un meilleur taux de recouvrement des graminées. Elles sont plus à même de concurrencer les adventices, ce qui réduit le salissement de la parcelle », ajoute Pauline Hernandez, conseillère fourrages de la chambre d’agriculture de l’Indre, invitée lors du webinaire.

Cette pratique favorise les espèces prairiales au détriment des dicotylédones annuelles. Toutefois, il est recommandé de respecter un temps de séjour court des animaux sur la parcelle et de limiter leur présence en cas de faible portance.

Raisonner la taille et la forme des paddocks

La pratique du pâturage tournant doit aussi être examinée à la loupe. Cette technique a un effet bénéfique sur la composition et la densité du couvert végétal ainsi que sur la présence d’adventices.

En revanche, Pauline Hernandez précise qu’il est nécessaire d’aménager le parcellaire et les paddocks pour limiter le tassement de certaines zones :

« Pour que l’effet bénéfique du pâturage tournant soit optimal, il faut raisonner la taille ainsi que la forme des paddocks, stabiliser les chemins et les zones d’abreuvement. La parcelle doit être agencée de façon à répartir la présence des animaux sur l’ensemble de la surface », précise-t-elle.

Une fois l’ensemble de ces leviers actionnés, en cas de salissement non maîtrisé, cette spécialiste propose en dernier recours d’intervenir avec un désherbant sélectif.

Associer le sursemis à un apport de fumier

Pour éviter la rénovation totale d’une prairie dégradée, un sursemis peut aussi être pratiqué. Pour cela, le pourcentage de sol nu dans le couvert ne doit pas excéder 30 % et l’abondance des plantes de bonne valeur fourragère doit être supérieure à 40 %.

La réussite de cette intervention est conditionnée à de nombreux facteurs, comme la nature du sol et la présence d’espèces stolonifères dans le couvert. L’apport de 15 t/ha de fumier améliore l’efficacité de cette pratique. C’est en tout cas ce que tendent à montrer plusieurs essais menés dans des fermes expérimentales de Vienne et du Maine-et-Loire.

Influence des apports de fumier

Des résultats cumulés sur trois ans montrent une augmentation moyenne des rendements des prairies sursemées de 3,3 t.MS/ha pour la ferme de Thorigné d’Anjou et 4,6 t.MS/ha pour la ferme du Mourier. De plus, ces essais ont mis en évidence l’influence des apports de fumier sur la composition du couvert.

Ils favorisent la présence de graminées et réduisent la part de diverses. Par exemple, sur la ferme de Thorigné d’Anjou, en 2023, les essais indiquent une augmentation de 29 % des graminées et une baisse de 31 % des dicotylédones par rapport à un sursemis sans apport de fumier.

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