Des tensions commerciales déjà palpables avant le Covid-19

Des tensions commerciales déjà palpables avant le Covid-19. CP : elypse/Adobe Stock
Philippe Chotteau, chef du département économie de l’Institut de l’élevage, et Thierry Pouch, économiste en chef à l’APCA, ont introduit, le 27 mai dernier, un cycle de conférences – organisé par l’Institut de l’élevage – sur les marchés mondiaux du lait et de la viande. La crise du Covid-19 a mis en exergue une situation mondiale déjà tendue.

« Le monde a connu un confinement quasi généralisé. Fin mars, il y avait 4 Md d’individus confinés. Près de 90 % des travailleurs étaient concernés dans le monde. L’impossible s’est produit ! Aujourd’hui, nous sortons très lentement du confinement. L’économie fonctionne toujours au ralenti », introduit Philippe Chotteau.

Les tensions commerciales étaient déjà palpables avant la crise du Covid-19 : « Il y a deux ans, j’évoquais déjà l’affrontement entre les États-Unis et la Chine ». Les conflits commerciaux se multiplient partout dans le monde : États-Unis/Chine, États-Unis/Union européenne, Chine/Autralie, États-Unis et Union européenne/Russie… Philippe Chotteau observe une très forte intensification des restrictions aux échanges mondiaux, « depuis 2017 et l’arrivée de Trump au pouvoir, mais pas uniquement. Le commerce mondial reculait déjà ». Avec le confinement, les échanges mondiaux se sont écroulés au premier trimestre 2020.

« Ce n’est pas un arrêt total du commerce, mais c’est un freinage considérable », nuance Philippe Chotteau.

Selon les prévisions de l’OMC pour 2020, les échanges mondiaux de marchandises reculeraient de 13 % (scénario optimiste) à 32 % (scénario pessimiste) par rapport à 2019. Or, dans la phase de mondialisation que l’on connaît depuis trente ans, ce sont les échanges qui avaient tiré la croissance économique globale.

Prévisions commerciales 2020

Quelles prévisions pour l’économie globale en 2020 dans ce contexte ? Le FMI prévoit une récession du PIB mondial de 3 % par rapport à 2019.

« Après la crise de 2007/2008, le repli du PIB mondial n'était que de 0,4 %, et c'était déjà considérable », rappelle Thierry Pouch, qui imagine trois issues possibles à une crise annoncée dès 2019.

- Issue 1 (monde d’avant) : reprise rapide de l’économie 2021, régime de croissance quasi inchangé avec domination de la finance, et une production évoluant à la marge vers des activités moins carbonées.
- Issue 2 (monde d’après) : crise salutaire pour transformer en profondeur le régime de croissance (croissance inclusive et soutenable, avec dose de démocratie participative et de choix sociaux).
- (Non) issue 3 : confirmation d’une phase longue de stagnation séculaire, c’est-à-dire un état stationnaire bas aggravé par la contraction des échanges commerciaux.

« Cela signifie le déclin du capitalisme ou la reconfiguration du cycle hégémonique et des espaces de pouvoir, mais en faveur de qui ? La Chine n’est pas prête à se substituer aux États-Unis, puissance hégémonique en déclin », explique Thierry Pouch.


Pendant ce temps, la zone euro se dirige-t-elle vers une nouvelle crise de la dette ? L’ampleur de la crise économique et sanitaire oblige ses États membres à lâcher les comptes publics.

 « Selon la Commission européenne, le PIB reculerait de 7 % en Allemagne, de 11 % en Italie et de 10 % en France en 2020. Le taux d’endettement s’élève à 75 % en Allemagne, à 116 % en France et en Espagne et à 197 % en Grèce », indique Thierry Pouch.

Et les marchés agricoles dans tout ça ?

Dans ce monde dans la tourmente, si les échanges agricoles reculent, la régression est sans commune mesure avec la situation dans d’autres secteurs, notamment l’électronique ou l’automobile.

« L’alimentation reste un besoin primaire pour les citoyens, qu'ils soient confinés ou non », appuie Philippe Chotteau.

« La viande et le lait sont des petits secteurs au niveau mondial, mais restent essentiels », précise Emmanuel Bernard, responsable de la commission viande bovine à l’Institut de l’élevage. 

En dix ans, les flux de viande bovine se sont réorientés vers les marchés de l’Asie du Sud-Est. Le marché atlantique est devenu minoritaire. Au niveau du secteur laitier aussi, la demande chinoise explose : « L’Asie est et restera un enjeu majeur », estime Emmanuel Bernard. La baisse du prix du pétrole a, par ailleurs, un impact direct sur des économies très importatrices de produits agricoles français, notamment l’Algérie.

Retrouvez les analyses plus poussées des différents marchés mondiaux du lait et de la viande dans les jours à venir.
 
À lire également : 
- Comment le Covid-19 a-t-il chamboulé le marché de la viande en Europe ? 
- Bovins vifs : le Moyen-Orient comme nouveau débouché ?
- Italie : une perte de valeur estimée à 113 € par tête en jeune bovin
- L'Espagne poursuit sa croissance des exportations vers les pays tiers

Vie Exploitation Agricole

Boutique
Div qui contient le message d'alerte
Se connecter

Identifiez-vous

Champ obligatoire Mot de passe obligatoire
Mot de passe oublié

Vous êtes abonné, mais vous n'avez pas vos identifiants pour le site ?

Contactez le service client abonnements@info6tm.com - 01.40.05.23.15